Tiens il pleut

Tiens il pleut
Tiens il pleut

jeudi 3 février 2011

La chambre de larmes.

Le corps déborde, le coeur aussi, c'est sa faiblesse et sa force.
Ils ne demandent qu'à faire eaux de toute part comme une barque fragile,mal arrimée.
Le pied qui bute sur une pierre , l'air de ne plus être là , le rythme .
Les scientifiques, eux qui expliquent mais ne consolent point, diront que le corps est composé à 80% d'humidité.
Où donc se loge le cher petit moi dans ce paysage aquatique.
Ou bien l'âme serait elle aussi fluide, et l'amour n'aurait plus qu'à naviguer entre rosées averses marées et tempêtes.
Le coeur déborde c'est sa beauté, dans le désordre et les fatales rencontres.
Les plus douces émotions comme les plus violentes jaillissent par les yeux, les larmes se fraient entre silence et musique, un chemin inédit où tout peut se dire, où tout demeure secret.
Reste cette source claire, pleurer c'est se déshabiller et se baigner d'un autre temps à la fontaine inépuisable.
Celle qui pleure, abondance, abandonne les masques et offre un visage perméable aux rêves,aux frissons, aux incertitudes d'être.
Pleurer c'est reconnaître et aimer en soi cette source mystérieuse et intarissable, l'amour ne sèche pas les larmes, il les incite, il les invite ,il les rend éclatantes,il n'apaise pas il exalte, il  exulte. C'est ainsi que les parfaits amants comme les grands mystiques font éclater les barrières, les limites qu'on appelle raisonnables et se livrent sans orgueil à ce qui les dépasse.
Le courage et l'orgueil sont ici dans l'abandon de soi à ces vagues amères, mélancoliques et douces, à ces profondeurs, à ces remous intérieurs qui fomentent grande naissance. L'eau des larmes fait verdoyer les déserts, c'est un élixir de jouvence entièrement  donné .Lorsqu'on ne pleure plus, les yeux restent secs, l'âge gagne et la mort fait craquer ses talons sur nos talons.
Les larmes font passage au temps, insaisissables, comme si la liberté ténue humaine avait à choisir entre laisser couler ses larmes et laisser s'écouler les ans.
Il n'est pas sûr que les sanglots soient à l'opposé des éclats de rire, ni que les larmes silencieuses disent le contraire du sourire radieux.
Nous sommes cet oscillement perpétuel, ce tremblement fervent dans l'avancée des jours, dans l'imprévisible de l'amour, dans l'improbable.
De pleurer comme on se lave
comme on bénit ou maudit
comme on se noie dans la clarté.
Les larmes sont un don.
Ces sources descellées feront sans nul doute refleurir nos déserts.
De toutes les créatures que le passant humain ignore ou méprise, s'élève ce murmure de l'eau, cette rosée vaporeuse, cet infini de la rivière.
Le langage très silencieux des larmes survivra à tout geste, tout vocable et sans doute les sauvera t il.
Il faut bénir ces déluges, ces moussons et chanter avec eux.
Les larmes échappent au concept, même le poète a un mal extrême à retenir sous sa paupière ces goutes d'invisible, tourment de l'artiste et de l'amoureuse.

Ce qui ne peut se garder est cela seul qui compte, ce qui ne peut se saisir s'avoue le bien le plus précieux.
Que pèse une larme, une nuit d'amour,
que pèse un sourire enchanté, un silence d'adoration.
Les larmes présagent la merveille.
Il y a la souffrance permise - quelle étrange expression - une fulgurance extrême qui déchire corps et coeur et se perd dans l'eau des yeux;
Il y a les amours ordinaires et ce qui dans l'amour ne revient pas, se laisse doucement sombrer dans les larmes sans retour.
Une façon délicate de signer un passage ou un acte.
En proie à une vérité plus forte que la mort,que l'âge ou la raison, les larmes aux yeux à force de percevoir un sens à la vie, ces larmes sont lumière en nous touchant.
L'enfant perdu qui pleure , pleure.
Il reste à se faire larme pour devenir océan,une grâce, une éternité d'océan

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