les livres sont tombés à l'eau
je n'ai pas tenté de les sécher sur un fil de brise,
ils ont vogué ,
moi, sur l'onde
toutes lettres poissons, oiseaux à l'envers,
au fil de l'eau , le moulin de l'aube au crépuscule
et la nuit ,
ronde , diagonale, triangulaire au souffle de paix
de mon hamac au bord de la rivière
je suis tombée dans le printemps
la tulipe a le pied du tuba
bronze de la nuit
la chair de la clarinette
et l'odeur entêtante du colza
avant de le voir
mon hamac un lit de poisson
entre les chaussées de la rivière
le saut d'un ricochet
l'éclair d'un son illuminé au calice du goût
il fait beau comme jamais
ma douce mon enfant
sur les époules du printemps
Je suis l'eau
et je prends tes yeux
au fond de la rivière
sur une pierre
Je suis le burin
et je taille tes peines
à petits coups marteau patient
sur le dos de tes mains
Je suis l'herbe
et je mêle ton chant
ondulant à mon galop courbe
à travers la plaine, âmes flancs des étamines
Je suis le temps
qui frappe ta poitrine
étrange instant des réveils
où le mur tremble
où les objets s'animent de lumière
où le chat sorgue assis sur le toit
de borgnon qu'il est, étire deux paupières, liquides pers
et conciliabule avec la cité au soleil, des géants allongés là,
mains de glaise et de marbre où chantent les lierres,
mystérieux instant où le point s'ouvre
et délie le soleil et la lune en ficelles nègres
peignes d'ivoire aux gibernes de clavecin
beauté et effroi des réveils où je me ploie sur ces cordes de vie,
la Seine une empoignade de tourbe,le pont a bougé,
les cygnes nagent tout autour de nos chevilles
l'océan qui baigne ma tête.
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